Les jeux comme les Katro ou les Fanorona n’attirent pas tellement les jeunes. Ce sont pourtant des jeux qui préparent au futur.
La 23ème édition du Salon des jeux de société à l’Alliance Française d’Antananarivo (AFT) a déçu les organisateurs. Les visiteurs n’ont pas seulement été moins nombreux que d’habitude. Les rares qui sont venus ont surtout préféré jouer aux jeux de société provenant de l’étranger plutôt qu’aux jeux traditionnels de Madagascar.
Alors que durant les précédentes éditions, les visiteurs se bousculaient et faisaient la queue pour attendre leur tour, cette fois, la salle est quasiment vide. « Nous attendons plus de cent jeunes par jour, mais comme vous voyez, le salon n’attire pas grand monde », déplore Manitra Razafindrabe, un des initiateurs du Salon.
Les tables de Fanorona et de Katro, deux jeux cérébraux traditionnels, n’ont pas suscité l’engouement, au grand regret des organisateurs. Ces derniers confient pourtant avoir lancé le Salon afin, entre autres, de « redonner vie aux jeux cérébraux typiquement malgaches ». Aujourd’hui, les jeunes semblent davantage préférer les jeux vidéo et les jeux électroniques sur smartphone ou tablette. Kaella, 13 ans, aime bien jouer au Katro, mais faute de camarades de jeux chez elle, elle dit se rabattre sur les jeux sur smartphone. « Comme tous mes amis », glisse-t-elle.
Vocation éducative
La jeune fille avait espéré trouver des partenaires de jeux pour jouer à son jeu de société préféré au Salon d’Andavamamba, mais elle a vite été déçue. « Les seules fois où je joue au Katro, c’est pourtant ici à l’AFT », indique-t-elle, sans cacher sa déception.
Lanto, moniteur de Fanorona, craint que le désintérêt des jeunes pour les jeux traditionnels n’aboutisse à une perte de repère et à la méconnaissance de la culture malgache. « Renoncer à ces jeux traditionnels nous ferait perdre progressivement notre culture et notre identité », déplore-t-il.
« historiquement utilisé dans l’éducation des rois, des reines et des officiers du royaume »
Car à Madagascar, les jeux de société sont bien plus que des jeux. Leur vocation est essentiellement éducative. Le Fanorona, un jeu stratégique, par exemple, est « historiquement utilisé dans l’éducation des rois, des reines et des officiers du royaume », écrit l’ethnologue Luc Tiennot. Eris Rabedaoro, auteur d’un ouvrage sur ce jeu, parle d’un art qui rassemble plusieurs disciplines comme les mathématiques, la physique, l’astronomie, l’architecture, la géométrie et bien d’autres.
Plus facile à jouer que le Fanorona, le Katro est plus un jeu de calcul qu’un jeu de stratégie. Il prépare les jeunes à leur avenir. Avec ce jeu, ceux-ci apprennent déjà, par exemple, à gérer les budgets futurs de leur ménage ou de leurs activités, ainsi qu’à gérer les récoltes et les productions.