Un possible coup dur pour la filière agro-alimentaire. Dans le projet de Loi de finances 2020, le gouvernement prévoit d’appliquer la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) sur le maïs et le blé. Ce qui ne serait certainement pas sans conséquence pour le secteur, en cas d’adoption dudit projet de loi.
Amiraly Hassim, président du Syndicat des industries de Madagascar (SIM) évite de se prononcer sur le dossier, du moins « pour l’instant ». Il en est de même pour Rivo Rabearivelo, le président du Malagasy professionnels de l’élevage (MPE), association qui œuvre pour le développement des élevages à cycle court. La direction générale des impôts adopte également la même posture, pouvant laisser ainsi croire à une éventuelle sensibilité autour du sujet.
Et pour cause, des rencontres entre le secteur privé et le gouvernement avaient eu lieu pour évoquer, entre autres, cette application de la TVA sur le maïs et le blé. D’autres réunions sont également programmées en ce sens, d’où la prudence à s’exprimer sur le sujet pour le secteur privé. Selon certaines indiscrétions, ce dernier aurait été prise de court, dans la mesure où, il n’aurait pas eu connaissance de l’initiative de taxation de ces deux produits, ce durant les rencontres avec les autorités lors de l’élaboration du projet de Loi de finances.
Interrogée sur le choix du gouvernement de frapper de TVA le maïs et le blé, Lantosoa Rakotomalala, ministre de l’Industrie, du commerce et de l’artisanat, renvoie la patate chaude à Antaninarenina. « Il faut demander au ministère de l’Économie et des finances », esquive-t-elle avant d’évoquer le principe de l’équilibre fiscal. « L’une des principales raisons, de la mise en place de la Loi de finances, est de permettre d’avoir un aperçu sur les recettes de l’État. On ne peut pas seulement considérer les dépenses, il faut aussi envisager comment est-ce qu’un pays peut faire entrer des recettes, et c’est l’équilibre entre les deux, qui permet d’obtenir l’équilibre du budget», explique-t-elle.
De son côté, le docteur Olivaniaina Davida Rakoto, évoque la question de priorisation derrière l’initiative. « L’État prend cette décision, quand il ressent le besoin d’augmenter les recettes fiscales. Il cherche alors des produits qui permettent de générer des impôts. Comme le maïs et le blé ne constituent pas une alimentation de base, ils peuvent être ciblés », soutient l’enseignant-chercheur en économie. « Cette proposition ne touche pas directement les petits consommateurs, mais plutôt, les grandes entreprises privées. Comme le maïs vendu dans les épiceries ne passent pas forcément par le circuit de distribution, il n’y aura pas de gros changements », estime-t-il.
Pression fiscale
Mais le projet ne devrait pas seulement toucher les grandes entreprises privées, qui dénoncent par ailleurs le fait d’être trop souvent en première ligne pour subir la hausse des impôts, en vue d’améliorer une pression fiscale relativement faible. Il se pourrait cependant, en cas d’adoption du projet de Loi de finances, dans sa configuration actuelle, que des conséquences en chaîne viennent pénaliser le secteur agro-alimentaire.
Le maïs constitue une matière première principale pour l’alimentation animale et touche ainsi la quasi-totalité des secteurs d’élevage, à savoir les filières avicole, bovine, porcine et ovine. Par ailleurs, compte tenu de la fluctuation du prix des matières premières, l’utilisation du blé s’avère intéressante en remplacement partiel du maïs dans ce secteur. Concrètement, si le sac de provende tourne aux environs de 120.000 ariary, suite à la taxation du maïs et du blé, ce prix dépasserait les 130.000 ariary. À titre d’exemple, pour un producteur moyen, qui disposerait d’un élevage avicole de 500 têtes, cela engendrerait une hausse attendue de 7 % du prix de sa production sur le marché.
La course contre la montre est engagée. Malgré les discussions initiées entre le secteur privé et les autorités, le temps risque de manquer. Le projet de Loi de finances est actuellement discuté à l’Assemblée nationale et au Sénat, pour être voté avant la fin de la session parlementaire, fixée le 13 décembre 2019.