Des centaines de milliers de catholiques ont rejoint la capitale pour avoir l’occasion de voir le Pape François. Les voyages jusqu’à Antananarivo n’ont pas été faciles pour beaucoup, ont parfois coûté cher, mais le bout du voyage est toujours rempli de bonheur et de découverte.
« Je suis bénie, je peux enfin mourir en paix ». À 70 ans, cette grand-mère voit un de ses rêves se réaliser avec la venue du Pape à Madagascar. Postée dans la rue pour accueillir le deuxième souverain pontife à avoir foulé le sol malgache, la vieille femme ne peut s’empêcher d’exprimer sa joie et son soulagement de voir enfin le Saint Père. Ce dernier est en visite sur la Grande île du 6 au 10 septembre, 30 ans après Jean Paul II.
Comme des dizaines de milliers d’autres personnes, notre grand-mère vient de loin, certains ont même parcouru des centaines de kilomètres, afin de rencontrer le Souverain pontife durant son court séjour à Madagascar. Le voyage leur coûte très cher, mais le bonheur qu’ils disent ressentir en voyant le Pape en vaut le prix. « Recevoir la bénédiction du Pape est d’une telle importance pour un chrétien catholique » explique Olaf Patricia Havanaby, responsable pastorale à l’EKAR Analamahitsy. « Ce n’est pas tous les ans que le Chef de l’église visite Madagascar, c’est pourquoi les croyants déploient tous les moyens pour venir à Antananarivo » poursuit-elle.
Originaire d’un village situé à deux jours de marche à l’Ouest de Marontsetra, Mboty Antiba et sa sœur Antoinette ont effectué leur voyage, à pied, en bateau et puis par automobile. Ce n’est qu’à Antananarivo qu’elles ont eu l’information afin de participer à la grande messe à Soamandrakizay le 08 septembre, qu’il leur faut un ticket d’entrée, disponible auprès des paroisses. « Nous ne savions rien sur le programme de la messe et autres. Notre objectif était d’arriver à Antananarivo, peu importe le coût », se justifie Mboty Antiba. Elle dit n’avoir été informée de la nécessité d’un ticket que par sa famille d’accueil tananarivienne. « Mais l’objet de notre voyage est d’assister à cette messe. Même si nous devions payer pour y accéder, nous le payerons » partage Mboty Antiba.
Jaoravoana, originaire de Maromokotra, un village se trouvant dans le district de Vohémar au nord-est de Madagascar, a dû vendre ces biens pour organiser le voyage vers Antananarivo. « Moi, ma femme et nos quatre enfants sommes tous venus à Antananarivo. Et comme nous devons nous-mêmes prendre en charge le coût du voyage, nous avons dû vendre deux zébus pour 2 millions d’ariary pour avoir la somme nécessaire », confie-t-il. « C’est une grosse somme, mais ce n’est rien par rapport à ce que nous allons recevoir du Pape », glisse-t-il ensuite. Avec un troupeau de 300 têtes en sa possession, Jaoravoana ne semble pas trop se plaindre.
Recherche de bénédiction
Dieudonné Rakotonindrina, fervent catholique âgé de 19 ans, pour sa part, a quitté, pour la première fois de sa vie son Ambositra natal. Objectif : voir le Pape et vivre à fond la rencontre, comme son père avait vécu une rencontre avec un autre Pape, Jean Paul II. « Mon père m’a raconté, quand il était encore en vie, que la rencontre avec le Pape Jean Paul II en 1989 a été le plus beau jour de sa vie », se rappelle le jeune homme. À l’entendre, son père était aussi venu pour la première fois dans la capitale à l’occasion de ce voyage. « Mais à l’époque, il était accompagné de ma grand-mère et de ses deux frères », poursuit-il. « Il aurait tellement aimé participer à cette visite du Pape François, mais malheureusement, il a perdu la vie au mois de juin», fait-il remarquer d’une voix triste. Ce voyage est cependant risqué, ne connaissant rien d’Antananarivo, mais il a accompli son devoir. Dans sa poche, il ne se sépare pas d’un bout de papier contenant deux numéros de téléphone, et l’endroit où l’on peut le ramener dans le cas où il se perdrait.
« Dès que nous avions appris, par la radio, que le Pape François allait venir à Madagascar, mon père et moi avions programmé le voyage avec mes deux petites sœurs. Nous avons augmenté le volume des champs à exploiter pour gagner plus d’argent, car on savait que ce voyage nous coûterait une fortune », raconte le jeune homme. Venu finalement seul dans la capitale, Dieudonné Rakotonindrina entend bien obtenir la bénédiction qu’il vient chercher. Et lorsque le Pape, dans la Papamobile, est passé devant lui à Ivandry vendredi, il a laissé exploser sa joie tout en n’oubliant pas de demander une faveur. « Vonjeo ny fanahin’ny ray sy reniko, ary arovy izahay telo mianadahy » (sauver l’âme de mes parents et béni moi et mes sœurs), a-t-il crié.
Pour Clarisse Soavavy, mère de famille de la Paroisse Saint Paul de Mangarivotra Toamasina, le voyage été plus facile. Habituée à la vie citadine et connaissant très bien la capitale, elle ne s’inquiète de rien. Avec quelques-uns de ses co-paroissiens qui partagent la salle où elle s’est installée dans une paroisse tananarivienne, elle s’est déjà entraînée pour venir à Soamandrakizay, lieu de la grande messe du Pape François. « Nous avons testé le trajet Analamahitsy Carrière – Soamandrakizay le 6 septembre dans la matinée et nous l’avons fait en une heure trente », indique-t-elle.