Je suis jaloux à regarder un documentaire montrant un Jacques Chirac fasciné par les estampes japonaises ou des vestiges archéologiques vietnamiens. Nous n’avons pas su faire de ces chefs d’État français, devenus notre «Étranger intime» par le fait colonial, les ambassadeurs de la «singularité» malgache : un peuplement demeuré «la plus belle énigme du monde», plusieurs variétés dialectales d’une langue indonésienne à un bras de mer de l’Afrique, le plus grand endémisme floral et faunal au monde, un État du Sud contractant avec les grandes puissances du XIXe siècle (Grande-Bretagne, États-Unis, Allemagne, Italie, France).
Le général de Gaulle était venu deux fois au Rova d’Antananarivo (10 octobre 1953 et 22 août 1958). François Mitterrand, alors Ministre de l’Outre-mer, l’y aura précédé (janvier 1951). Mais, Jacques Chirac (2005), François Hollande (2016), voire Nicolas Sarkozy (2018), avaient eu des agendas définitivement moins culturels.
Le Secrétaire général des Nations Unies Kofi Annan (17 mars 2006), le prince impérial du Japon Akishino (22 août 2007), l’Aga Khan IV (28 novembre 2007), figurent parmi les autres personnalités internationales à avoir rendu visite à cet ensemble, témoignage d’une histoire pas anodine entre 1610 et 1897.
Mais, par exemple, le prince Akishino s’intéresse plus particulièrement à l’Aepyornis, notre oiseau-éléphant dont le plus proche parent dans l’ordre des ratites est le minuscule kiwi australien. À une autre époque, le prince aurait pu observer le squelette reconstitué de cet oiseau géant parmi les collections du musée d’histoire naturelle, que l’administration coloniale avait installé dans l’ancienne salle du Trône, au rez-de-chaussée de Manjakamiadana (comme la République allait installer un dinosaure dans la grande salle d’Andafiavaratra)…
L’approche diplomatique du Japon, qui comprend une part culturelle fondamentale, mériterait d’ailleurs que Madagascar s’en inspire. En ce moment même, jusqu’au 19 juin 2020, le quatorzième Prix international du MANGA s’adresse aux candidats des quatre coins du monde. Et tandis que la Chine déploie ses instituts Confucius (lettré et philosophe des VI-Ve siècles avant J.-C.), l’Espagne ses «Cervantes» (écrivain du XVIe siècle), la Russie ses «Pouchkine» (écrivain du XIXe siècle), l’Allemagne ses «Goethe» (écrivain des XVIIIe-XIXe siècles), le Japon organise des concours de discours en langue japonaise et pas seulement dans les «Japan House» (Londres, Los Angeles, Sao Paolo), mais jusqu’à Antananarivo. Manga, Anime, Ikebana, Origami, Sushi, Karate, Nihongo : voilà les agents du Soft Power japonais qui alimente son «PNB du cool» (cf. Chronique VANF, «Apprendre à apprendre», L’Express de Madagascar, 23.05.2017 et «Diplomatie culturelle et d’influence», L’Express de Madagascar, 23.08.2019).














