Midi trente à Antananarivo. Les clients se bousculent dans la petite gargote que Rina (prénom d’emprunt) tient dans un quartier d’affaires de la capitale. Des gens attendent dehors, pendant que d’autres terminent leur repas autour de longues tables de fortune érigées sous un chapiteau planté sur le trottoir.
Quand un couple finit de manger, la vaisselle passe discrètement derrière le stand. La plongeuse essuie avec une éponge les assiettes pour évacuer les restes d’aliments dans un seau à ordures. Puis après avoir les plongées et frottées avec une autre éponge dans une eau savonneuse qui a dû servir pour beaucoup d’autres assiettes, elle les rince dans une eau qui n’est plus très claire. Entassées dans un coin de la cuisine de fortune, les assiettes sont essuyées par un autre serveur qui va servir d’autres clients avec celles qui ont déjà été utilisées.
La vaisselle se fait très vite dans la gargote de Rina. Malgré une apparente propreté du coin à manger et des ustensiles de cuisine qu’il utilise, l’hygiène n’est pas toujours au rendez-vous. Des mouches volent autour des clients, et les eaux usées stagnent autour de la gargote. Le jeune homme sait cependant que la propreté est un critère qui attire les clients, mais si ses tables, étals et vitrines sont plus ou moins propres, les parties moins visibles et ce qui se passe dans les cuisines ne le sont pas tout à fait. « Je sais qu’il faut respecter la propreté du local et celle des aliments. Mais parfois, il faut faire vite parce que les clients sont nombreux et nous n’avons pas beaucoup de temps pour se préoccuper de toutes ces questions. Nous devons surtout engranger des bénéfices », explique le gargotier.
Il sait aussi que des contrôles inopinés peuvent survenir pour la vérification du respect des règles d’hygiène. Mais comme aucun inspecteur n’est venu le contrôler depuis qu’il fait ce travail, il semble serein, presque indifférent. « Jusqu’ici, personne n’est venu me contrôler et je n’ai jamais été sanctionné », lance-t-il. L’ Agence de contrôle sanitaire et de qualité des denrées alimentaires (ACSQDA) avait récemment rappelé que « les règles d’hygiène et la qualité des aliments ainsi que les normes dans la production des denrées alimentaires jusqu’au bout de la chaîne, à savoir, la mise à disposition des consommateurs, doivent être respectées ». Des contrôles ont même été annoncés, mais beaucoup de gargotiers n’ont toujours pas vu les agents et les inspecteurs les inspecter.
À Madagascar, le Code de la Santé exige que « les emplacements où sont fabriquées, manipulées, entreposées ou mises en vente des denrées alimentaires soient tenus dans un parfait état de propreté à l’abri des rongeurs, des insectes et de tous animaux vecteurs de germes pathogènes ». Des normes d’hygiène et des règles de salubrité très peu respectées et rarement contrôlées.