Le coronavirus a fait des dégâts. Victimes humaines. Mais aussi, fractures morales. Pourra-t-on faire comme avant, comme si de rien n’avait été ?
Ces «citoyens du monde», établis en Chine pour sa prospérité et son dynamisme, mais qui, dès la première alerte, ont ressuscité leur passeport d’étranger pour se faire rapatrier chez eux, pourront-ils affronter le regard de leurs anciens voisins, qui ont d’ailleurs survécu, si jamais ils remettaient les pieds à Wuhan ?
On nous rabâche de solidarité mais ces trois premiers mois de 2020 ont montré la quintessence égoïste de l’Humanité. Dans une mondialisation qui s’était auto-proclamée «sans frontières», comment oublier que les visas d’entrée furent promptement exigés ?
L’espace «sans frontières» par excellence, le «Schengen» de l’Europe, a implosé. Une implosion paradoxale, systolique. Chaque pays a redécouvert la vertu de la bonne vieille frontière. Derrière, et à l’abri de ce «Terminus», c’est un confinement schizophrénique : fermeture des frontières sur la «nation», fermeture de chaque porte sur la maisonnée.
Les bien grands mots de solidarité (devoir), de coopération (win-win), d’empathie (posture), ont volé en éclats. Chacun chez soi et chacun pour soi, à domicile versus à l’extérieur. On restera toujours L’Étranger de chaque étranger d’un village planétaire étranger à lui-même.