«Don’t be a tough guy. Don’t be a fool !» : Donald Trump avait donc écrit à Recep Erdogan le jour même de l’offensive turque en Syrie, le 9 octobre.
Dans tous les commentaires, médiatiques et politiques, le président américain avait passé, au mieux pour un imbécile laissant la voie libre aux Turcs, au pire pour un criminel abandonnant ses anciens alliés Kurdes. La tonalité de cette missive adressée au président turc laisse penser à une possible autre réalité.
Ce «Ne fais pas le con» restera dans les annales. Bien entendu, le mot même de «diplomatie» y perd un peu beaucoup de son sens, mais il faut croire que la manière de faire de Trump «parle» à ses interlocuteurs les plus «tough». Avec le Russe Vladimir Poutine, la complicité affichée ressemble à un pacte de non-agression. Le Nord-Coréen Kim Jong-un est venu à sa rencontre sur la ligne de démarcation du 38ème parallèle ce que ni Kissinger, ni Brzezinski, ni aucun Nobel de la paix, n’avait jamais réussi à négocier. Là, Trump parle virilement à un Erdogan que les Européens n’ont ni la force ni la volonté de contrarier, même quand il envoie des milliers de ses sympathisants défiler dans les rues d’Allemagne pendant qu’il expurge tranquillement la Turquie de ses opposants, ou qu’il donne consigne aux footballeurs turcs de faire le salut militaire à l’issue d’un match contre la France.
Comment la lettre a fuité dans la presse, c’est une autre affaire. Mais, la tonalité est déjà plus sérieuse que des tweets à l’emporte-pièce : «Vous ne voulez pas être responsable du massacre de milliers de gens, je ne souhaite pas non plus être responsable de la destruction de l’économie turque».
On souhaite pouvoir lire d’autres lettres de Donald Trump, de la même veine : au Brésilien Jair Bolsonaro à propos de l’Amazonie qui n’est pas patrimoine de l’Humanité ; à l’Israélien Benyamin Netanyahou pour son entêtement à se succéder à lui-même sans espoir de paix avec les Palestiniens ; au Saoudien Mohammed ben Salman qui a avoué le meurtre et le dépeçage du journaliste Jamal Khashoggi ; au Chinois Xi Ping sur la réelle signification du «un pays, deux systèmes» à Hong-Kong ; au Britannique Boris Johnson de ce qu’il faudrait penser des députés de Westminster en flagrant déni de démocratie parce qu’ils n’entérinent pas purement et simplement le référendum en faveur du «Brexit»…
Ne faites pas les cons…