Des élections, mais lesquelles ? Au moins, les élections européennes concernaient les populations de vieux pays démocratiques dont certains lisent des journaux aussi anciens que respectables comme The Times (fondé en 1785), Guardian (1821) ou Daily Telegraph (1855). Au moins, les grandes lignes de fracture étaient connues : souverainistes contre bruxellistes, exceptions nationales contre multiculturalisme sans frontières. Au moins, les listes électorales ne comportaient pas le fantôme d’un grand-père défunt et le verdict de la deuxième plus grande élection au monde connu seulement quelques heures après la fin du scrutin.
Le Hongrois Viktor Orban, chantre d’une «nouvelle Europe» contre l’immigration et les quotas de refugiés imposés à de vieux villages traditionnels, affirmait vouloir sauver l’Europe chrétienne contre la contamination multiculturelle voulue par l’Union Européenne. Ce programme, clair et net au point d’en apparaître basique aux yeux du politiquement correct, a reçu l’assentiment de 52% des électeurs qui ont voté pour son parti «Fidesz». Sur les mêmes thèmes, son homologue polonais, Jaroslaw Kaczynski, engrange 46%. En France, le «Rassemblement National» de Marine Le Pen a capitalisé sur un désir similaire de quant-à-soi pour devenir la première force du pays, avec près d’un Français sur quatre.
En Grande-Bretagne, le parti pro-Brexit a remporté les élections avec un tiers des suffrages. Ce n’est pas la moindre contradiction interne de l’UE que de voir des Britanniques en mode Brexit participer encore à des élections de l’Europe et voter justement pour le parti qui compte acter définitivement le référendum d’il y a déjà trois ans. Et de voir siéger aussi massivement au Parlement européen ses adversaires qui ne sont pas encore en mesure de le saborder.