Une nouvelle commission et une échéance. Pour la première fois, Madagascar et la France établissent une échéance pour régler le différend entre les deux pays concernant les « îles Éparses ».
« Au nom du peuple malagasy (que) je demande officiellement et solennellement à Monsieur le président [Emmanuel Macron] de trouver une solution pour la gestion ou la restitution des îles Éparses à Madagascar », a lancé le président Andry Rajoelina, mercredi après-midi à Paris. C’était lors d’une conférence de presse conjointe avec son homologue français, à l’issue d’un entretien entre les deux hommes. Le président de la République, en visite officielle en France, « espère (…) qu’on puisse trouver une solution par rapport à la gestion ou à la restitution de ces îles Éparses (…) avant la célébration de notre 60e anniversaire du retour de l’ indépendance ». Autrement, une issue avant le 26 Juin 2020.
Andry Rajoelina évoque une démarche « par étape » pour gérer le dossier. « Il a été convenu que nous allons mettre en place une commission mixte pour trouver une solution », soutient le chef de l’État qui espère la mise sur pied de ladite commission « le plus tôt possible ». Emmanuel Macron trouve le délai pour la recherche de solution « légitime ». « Ce que nous lançons aujourd’hui c’est un travail conjoint, totalement partenarial, politique et administratif, sur ce sujet afin de bâtir une solution commune », détaille le président français.
C’est la première fois que Madagascar et la France fixent une échéance pour régler le différend qui accompagne l’histoire des relations entre les deux pays. Le président de la République avait promis de « faire ce que les autres n’ont pas fait depuis 60 ans » avant son départ pour Paris. Par contre, l’idée d’une mise en place de commission mixte n’est pas nouvelle. « Je l’ai remis sur la table l’année dernière en discutant avec le président François Hollande. On s’est convenu qu’on se réunira autour d’une table, à travers des commissions, pour discuter, pour voir l’issue ou les issues dans l’intérêt de tout le monde. Surtout dans l’intérêt de notre pays », avait lancé l’ancien président Hery Rajaonarimampiaina en 2015.
Sur le fond, Andry Rajoelina évoque une « solution pour la gestion ou la restitution des îles Éparses ». Le chef de l’État donne ainsi l’impression de ne pas être ferme sur une restitution pure et simple des « îles Éparses », prenant pourtant soin de ne pas prononcer le terme « co-gestion ».
Mais c’est quoi « îles Éparses » ? Il s’agit des îles, composées des îles Glorieuses, de Juan de Nova, d’Europa, de Bassas da India et Tromelin, éparpillées dans l’océan Indien, le Canal de Mozambique et se trouvent dans le voisinage immédiat de Madagascar. Au total, il s’agit de près de 40 km² de terres émergées. Mais les intérêts de ces territoires sont ailleurs. Elles représentent des enjeux géopolitiques majeurs. Ces îles sont synonymes de près de 640 000 km² de zones économiques exclusives (ZEE) pour le pays qui les possède. Il s’agit en fait d’un espace maritime sur lequel un État côtier exerce des droits souverains en matière d’exploration et d’usage des ressources, selon le droit maritime, et ces îles sont réputées pour leur biodiversité et pour leurs potentialités en matière d’hydrocarbures et de gaz.
L’histoire des « îles Éparses » est inséparable de l’histoire des relations entre Madagascar et la France. En 1979, l’assemblée générale des Nations unies, dans ses résolutions, « invite le Gouvernement français à entamer sans plus tarder des négociations avec le Gouvernement malgache en vue de la réintégration des îles précitées, qui ont été séparées arbitrairement de Madagascar ».
Des amorces de discussions entre les deux pays avaient continué. Entre-temps, la France avait renforcé sa position en votant une loi rattachant les « îles Éparses » en tant que 5ème district des Terres Australes et Antarctiques françaises (TAAF) en 2007. Des bateaux de pêcheurs malgaches, qui se sont livrés à des activités de pêches, avaient même été interceptés aux alentours des îles.