Diminuer le budget consacré à la nourriture, opter pour la marche au lieu de rentrer en bus, jongler entre deux emplois. Tous les moyens sont bons quand il s’agit d’économiser des sous. De nombreux ménages malgaches résidant en milieu urbain doivent se débrouiller avec un revenu égal ou inférieur à 155 000 Ariary par mois. Comment font-ils ? La question est abordée.
À 20 ans, Kanto est mère de famille. Son mari est salarié en tant que gardien de dépôt au sein d’une société d’ameublement. Il gagne 150 000 Ariary par mois. « Ce que mon mari gagne n’est pas assez pour la famille. Pour l’aider, je fais la lessive et parfois du jardinage ». Avec ce revenu, la famille de Kanto doit assurer le repas et le transport, le strict nécessaire. « Comme nous habitons chez ma mère, nous ne payons pas le loyer » affirme-t-elle. Parfois même, il lui arrive de marcher pour aller au travail afin de diminuer les dépenses.
À Madagascar, le salaire minimum est fixé à environ 170 000 Ariary au 1er mars 2018, celui-ci était de 144 000 Ariary en 2017, soit une hausse de 18% en un an. Malgré cette hausse, les ménages malgaches jouent le jeu de la survie, un défi permanent auquel ils semblent s’être habitués. Rakoto, pour y faire face, prévoit juste de ne pas tomber malade cette année. Pour ce célibataire qui gagne à peine le salaire minimum, le loyer à lui seul constitue 30% de son revenu. Le transport et le repas constituent également des postes importants sur ses dépenses.
Fanja, une institutrice retraitée, n’a pas non plus pu s’en sortir avec son salaire et a dû trouver des astuces pour arrondir ses fins de mois. « J’ai été recrutée par l’association des parents d’élèves dit FRAM (Fikambanan’ny ray aman-drenin’ny mpianatra), ce qui me permettait de gagner un peu plus. Il m’arrivait aussi de faire de la couture ou de cuisiner des beignets que je vendais sur le marché », confie-t-elle. Mais cette situation ne semblait pas la gêner. « Tout ce qui comptait, c’était d’offrir une meilleure condition de vie pour mes enfants », poursuit-elle.
Promesse
Les frais médicaux ne figurent pas toujours dans le budget mensuel des ménages malgaches. Ils doivent souvent compter sur la providence pour s’en sortir, ou alors tout dépenser pour se soigner. « Je me souviens qu’une fois mon fils avait besoin d’être opéré d’urgence. Un ami a décidé de prendre en charge les frais d’hospitalisation. À ma grande surprise, je n’ai rien remboursé », confie Fanja. Kanto, elle, n’a pas eu cette chance. « Quand ma fille a eu la rougeole, j’ai dû dépenser tout mon salaire pour payer les frais médicaux », se rappelle-t-elle, encore amère.
Pendant la campagne électorale, la hausse du salaire minimum, pour atteindre 200 000 Ariary, figure parmi les nombreuses promesses du nouveau Président de la République. Mais les conséquences que cette augmentation pourrait avoir sur le prix à la consommation inquiètent. D’autres solutions doivent alors être trouvées. « La revue des salaires à la hausse ne peut être atteint sans inflation », affirme le Professeur Timon Jules Rakotondrabe, enseignant en économie.
La hausse annoncée, enfin, peut ne pas concerner ceux qui gagnent plus du salaire minimum et ceux qui exercent dans le secteur informel. D’autres solutions sont requises pour améliorer le pouvoir d’achat. Toujours selon le professeur Timon Jules Rakotondrabe, « la création d’emplois constitue la meilleure solution pour stabiliser les prix sur le marché ».