Ironie et hasard des calendriers. Le jour même, et à la même heure, où le président français Emmanuel Macron mettait les pieds sur l’île de la grande Glorieuse, une réunion convoquée par les ministères de l’Environnement et des Affaires étrangères devait valider le «chapitre Madagascar dans l’Atlas régional de l’Océan Indien occidental des Aires Marines Protégées» avec comme enjeu l’opposition à l’intention de la France d’inclure dans ses AMPs les îles Glorieuses, Juan de Nova, Bassas da India et Europa dont Madagascar revendique la propriété.
Sur l’île de la «Grande Glorieuse», le président français, après un long développement sur un «nouveau modèle» axé sur la préservation de la biodiversité, a lâché un «(Ici), c’est la France». Décolonisation inachevée lui reproche-t-on depuis Madagascar : mais, Emmanuel Macron sera accusé de haute trahison s’il lâchait un seul centimètre carré de «terre française». Le grand public français, à 10.000 kms, ignore ces îles dans le Canal de Mozambique, mais l’opposition souverainiste et nationaliste se tient vraisemblablement à l’affût du moindre faux-pas.
Du côté comorien, le président Ahmed Abdallah avait revendiqué les îles Glorieuses, le 18 janvier 1980, lors d’une visite à Paris : «les îles Glorieuses appartiennent aux Comores en raison de la proximité avec le banc du Geyser. Dès que nous aurons récupéré Mayotte, nous revendiquerons officiellement les Glorieuses». Cependant, sur le plan géographique, les îles Glorieuses sont plus proches du Cap d’Ambre ou de Nosy-Be (222 km) que de Mayotte (253 km). Sur le plan politique, Mayotte avait choisi de rester française par le premier référendum du 22 décembre 1974 : 5.110 OUI (36,18%) contre 8.783 NON (63,82%). Un second référendum du 8 février 1976 confirmera ce choix à 99,4%. Enfin, le 29 mars 2009, les Mahorais acceptèrent que leur île devienne le 101ème département de France.
Dans un premier processus d’appropriation, Madagascar a décidé de renoncer au (trop) générique «îles éparses» pour parler des «îles malgaches». Malgré quatre décennies de revendications portées par trois présidents de la République (Didier Ratsiraka, Hery Rajaonarimampianina, Andry Rajoelina), nous n’en sommes qu’au tout début d’un long et complexe processus.